Artiste contemporain.
Né en 1943, William Wegman, peintre et dessinateur américain, est surtout connu pour son travail photographique. Depuis
40 ans, il utilise le chien de la race 'braque de Weimar' comme thème central. Man Ray, son premier chien puis Fay et sa descendance sont devenus ses modèles, jouant sous son objectif les mannequins
de mode ou des personnages humanisés.
WEGMAN William, Francis, Cher, Pat and Sally, 1998 |
Derrière la légèreté et l'humour affichés, l'œuvre de
William Wegman est nourrie de questionnements plus profonds sur les comportements humains et
leurs représentations. Chaque photographie semble dire : « Ceci n’est
pas (seulement) une image de chien », mais une réflexion sur les images que
les humains produisent d’eux-mêmes.
Site de l'artiste : http://www.wegmanworld.com
Site de l'artiste : http://www.wegmanworld.com
Rite initiatique ?
Ce chien voilé, qui semble tout droit
sorti d’une confrérie obscure, surprend et inquiète par sa grande proximité
avec l’humain et par son regard hypnotique et inquisiteur. Wegman fait de l’animal
notre égal, le miroir de nos rites sociaux (allusion au bâptème ? châle de
mariage judaïque ? scène initiatique d’une religion lointaine ?) « Fay Ray », 2006.
WEGMAN William, Fay Ray, 2006
Clichés populaires
Légèrement subversif et franchement
décalé, l’humour de William Wegman s’est notamment exprimé à travers des
citations de contes par des sortes de séries-fictions (suite de mises en scènes théâtrales réunies en albums)
comme « Le Petit Chaperon rouge » ou « Cendrillon », avec
force effets de décors en carton pâte. Ces clichés viennent débusquer en nous-mêmes nos rêveries de pacotille. L'image passe tour à tour de la construction kitsh du merveilleux à la réflexion sur les limites entre mise en scène narrative et portrait (album "Cinderella")
WEGMAN, Fay's Marchen, Livre Cinderella, ed. Schirmer Mosel, 1993, 40p
WEGMAN William, FAIRY GODMOTHER (CINDERELLA) 1994 Color Lithograph 20½ x 17 inches |
WEGMAN William, Top Dog in a Top Coat, 2011, polaroïd. |
L'image acquiert plusieurs dimensions : elle est imitation et parodie de la photographie de mannequin (de la photo parfaite de mode). Mais, décalée, elle incarne aussi la représentation du lecteur lambda qui se projette dans le portrait de mode par le biais de la figure du chien qui reste non conforme, non idéale, quoique lisse.
Conventions, postures obligées
La photographie d’album de famille et ses conventions est aussi questionnée : une chienne grande bourgeoise alongée sous un portrait de famille ("Stepmother" 1992), une jeune mariée dans le traditionnel portrait de mariage (voir + haut "Cinderella, Just married").
WEGMAN William, Stepmother 1992 Color Polaroid, 24 x 20 cm |
En cela, Wegman aborde les thèmes de l’identité, de la normalité, de l’apparence, du conformisme, du décalage : du désir de vouloir être ce qu’on n’est pas, de vouloir se montrer selon des codes bien qualibrés tel qu’on voudrait être.
WEGMAN, pas de légende. |
WEGMAN William, Fermier et son fils, 1994/2009 |
Ici, deux fermiers fiers devant leur champ, propriété transmise au fil des générations… "Fermier et son fils" 1994 miment la photographie sociologique.
Esthétique de magasine
Sans titre, parodie du portrait de star-fashion victime |
WEGMAN William, Armed Chair, date inconnue. |
Le chien et la prise de vue, dont la beauté respective s'éclairent l'un l'autre, forment un tout qui ne correspond pourtant pas forcément au cliché de l'image de mode idéale et parfaite. Dans "Dog High Heels Fashion", Elles produisent autant un hommage à la beauté qu'un moyen de créer du décalage, une gêne, un sourire - c'est-à-dire une brèche de pensée et d'humanité dans un milieu où l'image est convenue, où domine la norme idéale et s'efface l'individu particulier.
WEGMAN William, Dog High Heels Fashion |
Humanité / Animalité
L’artiste se sert-il sans scrupule de ses modèles ? Il se défend de faire travailler ses chiens comme des bêtes : « Prendre une photo dure 1/60e de seconde, c’est la préparation qui est longue. Le chien, lui, attend sur le canapé qu’on l’appelle."
Il dit aussi : « Mon braque Man Ray n’a jamais pensé qu’il était chien », parlant de son premier compagnon, acquis, presque contre son gré, sur l’insistance de son épouse. Ce chien qui lui tenait compagnie à l’atelier se plaça un jour pour attirer l’attention devant l’objectif. Placide, et ayant comme particularité de garder la pose dans laquelle on le place, le braque de Weimar devint la « matière vivante » de prédilection des « tableaux » photographiques de l'artiste. Ceci dit, Wegman dit aussi qu'il garde "relativement" la pose ... La photo est le produit d'un hasard heureux !
Il dit aussi : « Mon braque Man Ray n’a jamais pensé qu’il était chien », parlant de son premier compagnon, acquis, presque contre son gré, sur l’insistance de son épouse. Ce chien qui lui tenait compagnie à l’atelier se plaça un jour pour attirer l’attention devant l’objectif. Placide, et ayant comme particularité de garder la pose dans laquelle on le place, le braque de Weimar devint la « matière vivante » de prédilection des « tableaux » photographiques de l'artiste. Ceci dit, Wegman dit aussi qu'il garde "relativement" la pose ... La photo est le produit d'un hasard heureux !
Après la mort de Man Ray, il sera touché par la grâce de Fay, braque de Weimar elle aussi : « Elle était très raffinée, sérieuse, presque sévère, façon Joan Crawford. » « Les chiens sont des êtres doués d’un grand sens de l’imitation. Si on prend la peine de les écouter, on réalise à quel point ils sont conscients de ce qui les entoure. » C’est cette conscience qui fait la profondeur du regard des chiens. Regardez cette étonnante
Bête de mode, image d'art
Les chiens de Wegman ont aussi joué réellement les dog-modèles pour
photos de mode. « Les braques de Weimar ont une expression un peu vide,
une attitude décontractée, comme les mannequins lors des défilés »,
décrypte le photographe. Et comme toute star, ils ont un couturier fétiche : « Issey Miyake est celui qui leur va le mieux. Les formes de ses vêtements [ultraplissés] épousent parfaitement leurs formes. » Même ligne graphique en effet, comme ici, dans « Evolution of a Bottle in Space » (1999).
Bête d’art
Tous les chiens de Wegman jouent de la frontière floue entre humanité et animalité, et tous revisitent l’histoire de l’Art, en des mises en scène ironiques et tendres, à des niveaux plus ou moins visibles. |
WEGMAN William, Split Level, 2010 |
Wegman Connector, 1994 |
WEGMAN William, Stormy Night, 1972 |
WEGMAN William, Platform Shoes, 2008 |
sans légende |
sans légende |
WEGMAN William, Formes élémentaires, 2009, photographie |